Yamantaka est une divinité tantrique importante dans le bouddhisme tibétain, déité centrale du bouddhisme vajrayana, Yamantaka est désigné comme le "destructeur de la mort".
Il est décrit comme le "conquérant du seigneur de la mort".
Ce nom sanskrit se compose de deux parties principales :
"Yama", qui représente le dieu de la mort, et
"antaka", signifiant destructeur.
Ainsi, Yamāntaka est interprété comme "destructeur de la mort", "Bourreau de la mort" ou bien "celui qui met fin à la mort".
Yamantaka est considéré comme une manifestation de Manjushri, le bodhisattva de la sagesse, sous une forme courroucée.
Manjushri incarne la sagesse non-duelle, mettant fin à la dualité fragmentée des phénomènes causée par l'ignorance. Émanant de la base primordiale, les phénomènes sont intrinsèquement non-nés. Toutefois, sous l'emprise de l'ignorance et de l'attachement au "moi", ils émergent en tant que samsara et nirvana. Sous l'illusion, ils se manifestent comme des phénomènes composés et impermanents, soumis à la naissance et à la mort. Pour transcender cette illusion et la mort, Manjushri revêt la forme redoutable de Yamantaka. Celui-ci révèle la sagesse de la vacuité et synthétise le jeu des multiples dans la non-dualité.
Yamantaka engloutit alors dans le dharmadhatu, sans exception aucune, toutes les troupes de la mort qui dévorent les trois mondes
(Texte tiré du recueil "précieuse corbeille des préceptes, Upadesa rin- po- che za- ma- tog).
2- Genése de Yamantaka
Considéré comme héritage culturel de la divinité hindoue Kalantaka, une des émanations du dieu Shiva, qui délivra son disciple des griffes de la mort Yama, et, est considéré comme la divinité à l'origine du Mahamrityunjaya Mantra, tant dans le bouddhisme que dans l'hindouisme.
Cette assimilation peut être vue comme une incorporation de concepts et de figures religieuses préexistantes dans la tradition hindouiste, où elles sont réinterprétées et adaptées pour s'aligner avec les enseignements et les pratiques bouddhistes.
Dans le cas de Yamantaka, cette assimilation ajoute une dimension symbolique et spirituelle à cette déité dans le contexte du bouddhisme vajrayana, où Yamantaka représente la transcendance de la mort et la réalisation de l'illumination.
Sa représentation présente de nombreux parallèles avec Yama, le dieu de la mort Hindou : chevauchant souvent un buffle et souvent dépeint avec une tête bovine. En raison de cette ressemblance et de la similitude de nom, il est fréquent de trouver des textes confondant Yamāntaka et Yama comme étant la même divinité, bien qu'ils soient distincts.
3- Signification de "mettre fin à la mort" dans le bouddhisme
Dans le bouddhisme, l'idée de "mettre fin à la mort" ne se réfère pas à une cessation physique de la mort, mais plutôt à une cessation du cycle de la renaissance, ou samsara, amenant à la libération ultime ou illumination: le nirvana
Dans le bouddhisme, le cycle de la renaissance est considéré comme empreint de souffrance. La libération du samsara signifie échapper à ce cycle incessant de naissance, vie, mort et renaissance. C'est la cessation ultime de la souffrance.
Mettre fin à la mort est associé à la réalisation de l'illumination ou de l'éveil. C'est l'état de pleine conscience et de compréhension profonde de la nature de la réalité, qui transcende les limites du corps et de l'esprit.
Dans le bouddhisme, la mort est considérée comme le résultat de l'attachement à l'ego et à l'illusion du soi. Mettre fin à la mort implique de transcender cet attachement égoïste et de réaliser la nature illusoire du soi, conduisant à la libération de la souffrance.
Mettre fin à la mort n'est pas seulement une réalisation individuelle, mais aussi un engagement envers la compassion universelle. Les bouddhistes du grand véhicule ou Mahayana atteignant l'illumination sont censés revenir dans le samsara pour aider les autres à atteindre également la libération, partageant ainsi leur sagesse et leur compassion.
Le bodhisattva celui renonçant à sa propre libération pour rester dans le cycle de la renaissance afin d'aider les autres à atteindre l'éveil est le concept essentiel du Mahayana ou Vajrayana, en contraste avec le bouddhisme Theravada ou petit véhicule, qui met l'accent principalement sur la recherche de la libération individuelle.
Ainsi, Yamāntaka incarne à la fois le but et le parcours du pratiquant vers l'illumination. À l'ultime éveil, on manifeste Yamāntaka - la cessation de la mort.
4- Yamantaka dans les textes des tantra
Dans les cercles ésotériques du bouddhisme et de l'hindouisme, Le terme "tantra" se réfère à une catégorie de textes et de pratiques associées à des pratiques secrètes.
Ces textes contiennent des enseignements et des rituels qui visent à transcender les limites ordinaires de la conscience humaine pour atteindre des états de conscience supérieurs.
Les pratiques tantriques impliquent souvent des visualisations intenses, des méditations sur les chakras, et parfois même des rituels impliquant des partenaires sexuels, mais dans un contexte strictement spirituel et sacré.
Un exemple de texte de tantra dans le bouddhisme est le "Guhyasamaja Tantra". Ce texte présente des enseignements sur la méditation, la visualisation de mandalas, les pratiques tantriques, et l'union de la sagesse et de la compassion. Le Guhyasamaja Tantra est considéré comme l'un des textes fondamentaux du Vajrayana et est vénéré par les pratiquants bouddhistes tantriques pour ses enseignements profonds sur la nature de la réalité et la voie vers l'illumination.
Certains des principaux textes de tantra relatifs à Yamantaka dans le bouddhisme tibétain comprennent :
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Guhyasamaja Tantra : Ce tantra est l'un des textes fondamentaux du bouddhisme tantrique tibétain. Yamantaka est souvent considéré comme une déité principale dans la pratique de Guhyasamaja.
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Yamantaka Tantra : Il s'agit d'un texte spécifique dédié à Yamantaka. Il contient des enseignements détaillés sur la pratique de cette déité, y compris ses formes, ses mantras et ses mudras.
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Chakrasamvara Tantra : Bien que ce texte soit principalement axé sur la déité Chakrasamvara, Yamantaka est également présent dans certaines pratiques associées à Chakrasamvara.
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Vajrabhairava Tantra : Yamantaka est également vénéré comme une forme de Vajrabhairava, et ce tantra contient des instructions sur la pratique de Vajrabhairava, qui incluent souvent des aspects de Yamantaka.
Dans le Kangyour, la collection canonique des écritures du bouddhisme tibétain, on trouve également des textes relatifs à Yamantaka. Certains des textes importants incluent :
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Yamari Tantra : Ce texte décrit les pratiques tantriques associées à Yamantaka, y compris ses formes, ses mandalas, ses mantras et ses rituels.
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Yamantaka Puja : Ces textes comprennent des prières, des méditations et des pratiques dédiées à Yamantaka. Ils sont utilisés dans les rituels et les cérémonies religieuses tibétaines pour invoquer Yamantaka et bénéficier de sa protection et de ses bénédictions.
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Yamantaka Sadhanas : Les sadhanas sont des pratiques de méditation guidées qui incluent des visualisations, des récitations de mantras et d'autres rituels spécifiques. Plusieurs sadhanas de Yamantaka sont inclus dans le Kangyour pour les pratiquants vajrayana.
Parmi les 18 tantras du Mahayoga, qui sont une partie importante du Vajrayana, certains incluent des enseignements et des pratiques liés à Yamantaka:
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Guhyagarbha Tantra : Ce tantra présente des enseignements sur la nature fondamentale de l'esprit et la transformation des émotions en sagesse. Yamantaka est parfois mentionné dans le contexte de ces pratiques.
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Vajrapanjara Tantra : Ce tantra met l'accent sur la purification des obstacles et l'atteinte de la clarté de l'esprit. Yamantaka peut être invoqué dans les pratiques décrites dans ce texte.
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Vajrapanjara Yamantaka Tantra : Ce tantra spécifique est dédié à Yamantaka et contient des instructions détaillées sur la pratique de cette déité, y compris ses formes, ses mandalas, ses mantras et ses rituels.
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Sarvadurgati Parishodhana Tantra : Ce tantra vise à purifier les obstacles karmiques et à dissiper les illusions. Yamantaka est parfois invoqué comme une force protectrice dans ces pratiques.
5- Les manifestations de Yamantaka
Il existe une multitude de manifestations de Yamantaka, mais cinq d'entre elles sont considérées comme essentielles.
Manjusrikaya (tib: Jam- dpal- sku):
"Manjushri, la divinité du corps" des Kagyé dans l'école Nyingmapa, est représentée sous la forme d'un héruka à trois têtes, six bras et quatre jambes. Sa couleur est jaune foncé, avec un visage blanc à droite et un visage rouge à gauche. À sa droite, il tient un vajra, une épée et une hache de guerre (ou une aiguière), et à sa gauche, il fait un geste menaçant (ou tient une coupe crânienne), un lacet (ou une flèche) et une coupe crânienne remplie de sang. Il est représenté piétinant un démon masculin et un démon féminin, avec des ailes de vajra déployées, et il est uni à une vétali noire. Son mandala comprend cinquante-huit déités.
Il existe également une forme bleue de Manjushri (avec un visage blanc à droite et un visage rouge à gauche), tenant une roue, une épée et un vajra dans ses mains droites, brandissant une massue et un pilon à gauche, et faisant un geste menaçant avec la dernière main.
Yamantaka ou Yamari noir (Tib: Shin- rje- gshed nag po)
Cette manifestation de Yamantaka peut prendre différentes formes : un visage et deux bras, un visage et six bras, trois visages et quatre bras, ou trois visages, six bras et six jambes. Ses attributs distinctifs incluent le bâton à pointe de vajra et le lacet, et il est uni à Vajravetali.
Yamari rouge (tib: Shin- rje- gshed dmar- po):
Yamantaka apparaît sous une seule forme avec un visage et deux bras. Dans un état extrêmement courroucé ,orné de tous les attributs macabres, il se tient avec les jambes écartées vers la droite sur un buffle rouge, au-dessus d'un disque de soleil.
Sa main droite brandit un bâton à crâne, tandis que sa main gauche tient une coupe crânienne remplie de sang.
Il est uni à Vétali rouge, tenant une lame courbe et une coupe crânienne remplie de sang.
Tous deux sont entourés de flammes.
Vajrabhairava (tib: rDo- rje 'jigs- byed) Terreur adamantine: